jeudi 19 novembre 2009

Patrick Wolf - Nouveau Casino, 09.10.09



Patrick Wolf est un être à part. Capable de passer de l’électro barrée à la pop gentiment niaise, du short d’écolier au string sadomasochiste, ce caméléon de 26 ans en perpétuelle mutation affiche un parcours sans faute. Autant dire qu’à quelques minutes de son entrée en scène, on se sent un peu comme un enfant sur le point d’ouvrir une pochette surprise.
C’est précisément ce qui fait la magie de Patrick Wolf. A Londres en juin dernier, Patrick rodait encore les morceaux de The Bachelor, album ambitieux financé par ses fans puisqu’Universal l’a gracieusement remercié il y a quelques mois, visiblement peu convaincue par les délires fétichistes et les légendes Irlandaises. Cette fois-ci, ces mêmes morceaux seront parfaitement maîtrisés et même transcendés, portés par un excellent groupe et un chanteur visiblement heureux d’être de retour dans cette capitale qu’il chérit tant.

Comme toujours, Patrick choisit la grandiloquence pour entrer sur scène. Air grave, démarche lente et assurée, vêtu d’un superbe costume noir et blanc d’un autre siècle, il tourne le dos au public avant d’entamer Who Will? dans un silence religieux. L’assemblée retient son souffle, dès les premières secondes tout le monde semble savoir que la prochaine heure sera absolument magique. Bluebells déchaîne la foule, vite calmée par les premières notes de l’enchaînement Damaris/Pigeon Song dominé par les violons de Patrick et Victoria Sutherland, virtuose dont le talent et la présence illuminent chaque performance. L’instant est divin et la voix de Wolf fait ici des merveilles, tout le monde savoure en silence ce moment sublime et sacré. The Bachelor, Battle et Tristan ramènent la salle à la réalité, dommage qu’en live ce dernier morceau soit moins brutal que sur disque.
Souriant, généreux, Patrick gratifie son public d’anecdotes entre chaque titre (chirurgie esthétique, Paris, blessure au doigt, Madonna et que sais-je), à mille lieues de sa prestation londonienne froide et théâtrale plus proche de la Sarah Bernhardt indie que du chanteur pop. Désormais vêtu d’un étrange costume à mi-chemin entre celui du philosophe antique et de la rockstar glam, Patrick introduit sa nouvelle chanson comme celle qui fera de lui « The new Britney ». Wild Life a en effet tout du tube en puissance, dansant, catchy et c’est à ce moment-là que l’on réalise que tout le monde s’est trompé sur Patrick Wolf: il n‘est pas seulement un timide chanteur indé caché derrière son violon. Flamboyant, diva, il veut être une popstar et l’assume désormais parfaitement. Avec Wild Life, Patrick tient en tout cas une composition à la hauteur de ses ambitions.

La suite du set sera beaucoup plus calme et mélancolique. The Sun Is Often Out, The Stars, Paris (hélas gâchée par quelques problèmes de son) et Theseus apaisent le public avant Hard Times et The Magic Position, deux titres délicieusement sautillants repris en choeur par des fans au septième ciel. Patrick quitte la scène sous une pluie d’applaudissements et revient quelques minutes plus tard vêtu d’un costume improbable, une merveille d’excentricité que Lady Gaga adorerait sans aucun doute. Vulture provoque une dernière fois l‘hystérie collective, le public reprenant à l’unisson les « d-d-d-d-d-d-dead meat » du refrain pendant que Patrick fait l’amour à un projecteur. On est showman ou on ne l’est pas.

Les lumières se rallument et le constat est sans appel: à l’heure actuelle, quel chanteur peut se permettre de toucher à tous les styles, d’en faire des tonnes au point d’osciller constamment entre le ridicule et le génie, transcendant la réalité? Personne. Les grands chanteurs romantiques au sens noble du terme se font hélas rares et la scène d’aujourd’hui manque cruellement de personnages grandioses capables de faire rêver, transformant leur propre personne et existence en oeuvres d’art . Patrick Wolf, c’est la revanche du persécuté des cours de récré, le musicien libre qui célèbre la beauté et la poésie.
Et s’il souhaite réellement devenir la nouvelle Britney, c’est bien tout le mal qu’on lui souhaite.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire