dimanche 6 décembre 2009

Morrissey + Doll & The Kicks - Aéronef, Lille, 10.11.09



Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il sait se faire désirer. J’attendais ce concert depuis février, et après une première annulation en juin, puis une hospitalisation et un attentat à la bière quelques jours avant la date Lilloise, je commençais à croire que je ne le verrais jamais. Mais enfin, ce jour était arrivé.
C’est toute intimidée que je rejoins la section hardcore des fans de Morrissey : Britanniques, Français, Belges, Néerlandais, ils se connaissent tous, mais n’ont pas tous l’air très commode. Les hommes en particulier sont assez impressionnants : coiffés comme Moz, habillés comme Moz, des allures de parfaits gentlemen, mais des gentlemen cinglés, quand même. Étrangement, je suis la seule à rire quand on nous indique que les bouteilles seront interdites à l’intérieur de la salle, « selon un choix de l’artiste », dixit la sécurité.
Je parviens à atterrir au troisième rang, et très vite débarquent Doll & The Kicks, groupe de Brighton emmené par une charmante brunette, dont sont probablement tombés amoureux tous les mâles non-homosexuels de la salle. Ses battements de (faux) cils et autres minauderies font des ravages, mais la musique du groupe n’est pas moins séduisante. Impossible de résister à leur pop énergique et extravagante, un brin glam, aux refrains catchy et au potentiel tubesque incontestable. Rarement une première partie avait été aussi agréable, et la voix assurée de Doll restent longtemps en tête une fois le groupe parti. Beaux, talentueux, et pistonnés par l’oncle Moz, on a un peu de mal à comprendre pourquoi aucun label ne les a encore signés.
Histoire de ne pas laisser le public se refroidir, on nous diffuse sur écran géant des clips des New York Dolls, Sparks, Lou Reed… Je m’extasie devant Johnny Thunders, comme avait dû le faire le jeune Steven, 35 ans avant moi.
Quand les lumières s’éteignent enfin, la tension est palpable, mon cœur est sur le point de sortir de ma poitrine. This Charming Man. Oh mon Dieu, il est là. Toute pensée cohérente quitte alors mon esprit. Morrissey est magnifique, Morrissey est grand, Morrissey, c’est Dieu. Pendant quelques secondes, le public semble trop chamboulé, submergé par l’émotion, mais se il ressaisit rapidement, et commence à chanter, à crier, à pousser. Ça risque d’être intense.
Morrissey est visiblement heureux d’être là, sa performance est impeccable, ne montrant aucun signe de fatigue ou de lassitude. Il discute beaucoup avec le public, serre des mains, reçoit des cadeaux. Les fans sont aux anges. Les gentlemen de tout à l’heure se sont transformés en véritables groupies. Tous les bras sont tendus vers la scène, tels des pèlerins tentant d’approcher un saint dans un espoir de guérison miraculeuse. Les paroles de chaque chanson sont récitées pieusement. Morrissey ne chante pas, il prêche.
La setlist met Years Of Refusal à l’honneur, même si les précédents albums solos ne sont pas en reste, mais l’émotion atteint son paroxysme sur les titres des Smiths. Cemetry Gates et Ask mettent le public à genou, nous voilà transportés 25 ans en arrière, on s’attend presque à voir Johnny Marr sur scène. How Soon Is Now nous est fatal. C’est ce texte, dans lequel on s‘est tous reconnu au moins une fois, cette voix déchirante, les guitares hypnotiques, et les stroboscopes, à vous rendre épileptique. C’est aussi Morrissey qui vous regarde dans les yeux en chantant « I am human and I need to be loved ». Moment d’extase.
Nous avons à peine le temps de nous remettre de nos émotions que c’est déjà l’heure du rappel, avec Something Is Squeezing My Skull. Un choix surprenant, mais qui fait tout de même son effet. Morrissey est applaudi pendant de longues minutes, tout comme le groupe qui l’accompagne, qui, s’il s’est montré discret, a parfaitement joué du début à la fin. Une chanceuse du premier rang reçoit la chemise sacrée, la serre contre elle comme s’il s’agissait du Saint Suaire. Les autres feront tout pour obtenir la moindre relique : bouteille, setlist…
Je quitte la salle avec la sensation d’avoir vécu une expérience aussi bien musicale que mystique, et je réalise que si nos sociétés modernes ne croient plus en rien, elles ont et auront toujours besoin de divinités. Des icônes, intouchables et immortelles, à qui l’on consacre sa vie, et parfois son argent, comme ce fan qui expliquait juste avant le concert les sommes phénoménales qu’il avait dépensé pour Morrissey. Mais pourquoi Morrissey, justement ? Peut-être parce qu’il répond parfaitement à la définition du martyr, celui qui souffre pour les autres, et qu’écouter un martyr exprimer sa souffrance constitue ce qu’il y a de plus cathartique.
Et peut-être aussi parce qu’un concert de Morrissey, c’est tout de même plus sympa que la messe du dimanche.

Setlist :
This Charming Man
Black Cloud
When Last I Spoke To Carol
Is It Really So Strange?
First Of The Gang To Die
Ganglord
Cemetry Gates
I'm Throwing My Arms Around Paris
Ask
Teenage Dad On His Estate
One Day Goodbye Will Be Farewell
Death At One's Elbow
Because Of My Poor Education
The World Is Full Of Crashing Bores
The Loop
How Soon Is Now?
Irish Blood, English Heart
I'm OK By Myself
Something Is Squeezing My Skull


4 commentaires:

  1. eh mais on pourait se voir à Londres alors ! (enfin si tu veux, j'y serais avec ma pote suisse qui fait TEA avec moi) t'aurais pas FB ? (si oui, moi je suis "Marie Blasée Hamoneau")
    non mais je te remercie pour Tumblr, il y a des gens qui tombent sur TEA comme ça.

    (et je trouve que Morissey vieillit très mal quand même, mais peut être que je pense ça juste par dépit car je ne le verrais surement jamais en live)

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  2. C'était beauuuuuu, c'était beau :) Je n'ai rien d'autre à dire, c'était splendide de se retrouver avec des fans de tous âges et de tous les horizons pour communier avec cet homme <3

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  3. Je suis jalouse, j'aurai tellement aimé le voir, j'ai eu plein d'occasion mais j'ai jamais de thune le moment venu...
    en plus il joue "ask".... mais pas please please please c'est domage.
    bref j'aime bien ton blog.

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  4. "Morrissey ne chante pas, il prêche". Mais oui, c'est tout à fait ça!

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